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Colombie : « le défi de la gauche consiste à savoir interpréter les besoins exprimés par les mouvements sociaux »

Nous publions ci-dessous une interview avec Dilberto Trujillo Dussan*, militant politique colombien du courant de la théologie de la libération. Cette interview exprime sont point de vue sur la situation sociale et politique en Colombie au moment où la signature des nouveaux accords de paix le 24 novembre 2016 entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) ainsi que les négociations en cours entre le gouvernement et l’Armée de libération nationale (ALN) ouvrent des nouvelles perspectives politiques dans le pays. Nous reviendrons sur la situation en Colombie et, plus en générale, sur la situation en Amérique latine, avec l’organisation d’une conférence à l’Université de Genève (Uni-Mail) sur le thème « Crise du capitalisme et accaparement de terres » prévue dans le courant du moi de mai (Réd. CLB)

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Réd. CLB : Plusieurs commentateurs ont caractérisé la signature des accords de paix entre le gouvernement colombien et les forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée du peuple (FARC-EP) de « moment historique ». En effet, beaucoup sont ceux et celles-ci qui voyaient en ces accords la possibilité concrète de mettre fin à un conflit durée plus de 50 ans et qui a fait 260 000 morts, plus de 60 000 disparus et 6,9 millions de déplacés. Pouvez-vous brièvement retourner sur le contexte historique et social de ces accords et sur ses enjeux ?

Dilberto Trujillo Dussan (DTB): Il est important de rappeler que les FARC naissent comme un groupe d’autodéfense paysanne [1] contre les attaques orchestrées par les premiers groupes paramilitaires de droite nommés Chulavitas et appuyés par le gouvernement du Parti conservateur au pouvoir en ce moment [2]. Ces groupes sont responsables de l’assassinat des centaines des paysans soutenant le Parti libéral. Ce fut une période de violence extrême caractérisée par une lutte entre des groupes de paysans pauvres qui soutenaient les deux ailes de l’oligarchie colombienne [3]. Cette sorte de « guerre entre les pauvres » a permis à l’oligarchie de continuer à s’enrichir. C’est dans ce contexte qu’en 1964 les FARC sont nées sur la base d’un programme agraire, le Programa Agrario de los guérilléros [4]. Depuis leur fondation, elles ont eu une grande influence parmi les paysans pauvres des zones rurales les plus isolées de la Colombie. Ceux-ci ont soutenu depuis le début le programme de réforme agraire promue par la guérilla. Au cours des premières années de vie, les FARC n’avaient pas du tout un projet communiste de transformation révolutionnaire de la société colombienne. C’est seulement à partir de contacts étroits avec le Parti communiste de Colombie que, d’une organisation d’autodéfense paysanne, les FARC deviennent une vraie « armée révolutionnaire » dont le but est la lutte pour la construction d’une société communiste en Colombie. À partir de 1984, les différents groupes de guérilléros en Colombie se sont engagés dans sept processus de paix avec le gouvernement. Cela montre la volonté, de la part de ces groupes, de parvenir à une paix par le biais du dialogue et des négociations. Toutes ces tentatives d’aboutir à des accords de paix ont échoué à cause de l’arrogance de l’oligarchie et du gouvernement colombien. Ceux-ci n’ont jamais voulu reconnaitre de facto les guérilléros en tant qu’acteurs politiques et n’ont pas écouté les revendications sociales avancées par ces groupes. Par cette attitude, il a été impossible de trouver une solution aux causes structurelles qui étaient à la base du choix de la lutte armée. Cela a empêché de mettre fin au conflit armé.

La situation a changé au cours des années 1990 quand plusieurs groupes armés tels que le Mouvement du 19 avril (M-19), l’Armée populaire de libération (EPL), le Courant de Rénovation socialiste (CRS), le Mouvement indigène Manuel Quintín Lame et le parti révolutionnaire des travailleurs de Colombie (PRT) [5], sont parvenus à négocier des accords de paix avec le gouvernement, ce qui s’est traduit par leur désarmement et leur intégration à la vie politique du pays. Ces accords ont ouvert la voie à l’Assemblée nationale constituante de 1991. Ce fut un moment histoire pour l’histoire du pays. Une nouvelle constitution a été promulguée sur la base de l’intégration de certains points du processus de paix, notamment celui qui a trait à la participation des tout citoyens à la vie politique du pays. Pourtant, l’histoire s’est répétée. Beaucoup des dirigeantes de ces groupes de guérilléros tels que Carlos Pizarro, Ernesto Rojas, Oscar William Calvo, Iván Marino Ospina, Álvaro Fayat, Carlos Toledo Plata, etc. ainsi que d’autres milliers des militants qui avaient déposé les armes ont été vilement assassinées par les groupes paramilitaires d’extrême droite formée par les Forces armées de Colombie (Armée et police) avec la complicité des mercenaires israéliens sous les ordres du lieutenant-colonel Yair Klein. Le financement de ces groupes était garanti par les grands propriétaires fonciers, les chefs des petites et moyennes entreprises et des multinationales [6].

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Manifestation pour la paix à Place Bolivar, Bogotà, le 13 octobre 2016

La prise de conscience du fait que la guerre avait atteint un « point mort», à savoir qu’aucune force en place (guérilla et forces armée de Colombie) aurait pu vaincre définitivement l’autre ainsi que la pression populaire et internationale pour aboutir à la paix a poussé les FARC et le gouvernement de la Colombie a signer les récents « Accords de paix pour mettre fin au conflit et construire une paix stable et durable » [7]. Ces accords mettent officiellement fin au conflit armé et ouvrent la voie pour résoudre les « conditions structurelles » qui sont à la base de la persistance des conflits sociaux en Colombie. Or, au-delà des proclamations, ces accords n’incluent pas les transformations révolutionnaires souhaitées par les FARC. Bien qu’il y avait des atteintes autour de la « question agraire », du fait que les FARC avaient son ancrage social dans la paysannerie pauvre, très peu de choses ont été obtenues sur ce plan [8]. Dès le début de négociations en 2012, le gouvernement du président Juan Manuel Santos a toujours refusé toute sorte de négociation autour du changement du modèle économique. La structure de la propriété foncière n’a pas été modifiée, l’hyperconcentration des terres productives dans quelques mains continue tout comme le phénomène d’accaparement des terres. Enfin, la question de la récupération des quelques 8 millions hectares de terres, volés aux paysannes au fil des années par les groupes paramilitaires, n’a même pas été sérieusement abordée.

En dépit de ces considérations, ces accords permettent néanmoins la poursuite de la bataille sociale sur le plan institutionnel via la participation au jeu démocratique dans le but de mettre fin aux inégalités sociales qui ébranlent la Colombie. Suite à la défaite subie par le président Manuel Santos lors du référendum du 2 octobre 2016, causé par la campagne ignoble et trompeuse de l’extrême droite dirigée par l’ancien président Alvaro Uribe [9] et de l’église évangélique, un nouvel accord de paix a été signé en décembre 2016. La signature d’un nouvel accord est certainement une chose positive. Par la suite, la Cour constitutionnelle de Colombie a donné libre cours au parlement colombien afin d’approuver les réformes et les règles nécessaires à la mise en œuvre de l’accord de paix selon un mécanisme accéléré d’approbation des lois parlementaires (Fast Track) qui est reconnu dans les normes colombiennes. Concrètement, dans le cas des accords de paix, l’introduction et les modifications des nouvelles lois permettant l’application de ceux-ci doivent être validés d’ici la fin de l’année 2018. Maintenant, le vrai défi commence, car il s’agit de mettre en œuvre le contenu des accords de paix. Le conflit armé avec les FARC s’est terminé, l’ère de la politique institutionnelle commence mais les conflits sociaux se poursuivent et s’intensifient.

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Le pésident Santos (G) et le chef des FARC Jimenez lors de la deuxième signature de l’accord de paix, le 24 novembre 2016 à Bogotà

Le gouvernement colombien doit veiller à ce qui s’est passé avec les accords de paix avec l’Union patriotique et la M-19 ne se répète plus jamais ! En Colombie, il doit y avoir des garanties pour que les gens puissent exercer le droit de protester et faire de l’opposition politique sans crainte d’être tué ou kidnappé.Le gouvernement et l’oligarchie doivent finalement comprendre que sans changements sociaux et économiques il n’y aura pas de paix en Colombie et les conflits se poursuivront. Les résultats des élections parlementaires et présidentielles de 2018 permettront de comprendre s’il existe une possibilité réelle pour la mise en place de ces accords. S’il y aura un élu du champ politique du président Santos, cela signifiera que le peuple colombien appuie sa volonté d’appliquer les accords de paix. En revanche, une victoire d’un candidat de l’opposition d’extrême droite d’Uribe constituera un échec pour les partisans de la paix. Dans ce cadre, l’un des grandes questions auxquelles nous sommes confrontées est de savoir quel rôle va jouer la gauche en Colombie : quel candidat soutiendra-t-elle ? Aujourd’hui, la gauche est confrontée à un problème d’orientation politique majeure. En effet, le soutient à un candidat du champ politique de l’actuel président Santos, ce qui pourrait être considéré comme un soutien à sa politique de paix, signifiera aussi le soutien concret à une politique économique néolibérale qui aggravent la pauvreté et au renforcement de la droite en Colombie…

Réd. CLB : Mardi 7 février ont commencé les pourparlers entre le gouvernement colombien et l’armée de libération nationale (ALN) à Quito (Ecuador). Comment ses négociations se présentent-elles ? Quelle est la différence entre ce processus de négociation et celui conclu avec les FARC ? 

DTD : L’ALN a été créée officiellement le 4 juillet 1964, sous l’influence de la révolution cubaine, par des étudiants colombiens. Elle se définit comme une organisation marxiste- léniniste avec une grande influence chrétienne du mouvement de la théologie de la libération [10]. En effet, parmi les dirigeants les plus connus dans le pays on dénombre une vingtaine de prêtres dont les figures historiques les plus connues restent celle du prêtre colombien Camilo Torres Restrepo (1929-1966) et des prêtres espagnols tels que Manuel Perez (1943-1998), Domingo Lain et José Antonio Jimenez.

Dès le début de son histoire, l’ALN dispose d’une présence significative au sein des universités publiques, des syndicats « de classe », des secteurs de l’Église catholique qui croient nécessaire de lutter pour la réalisation du socialisme ainsi que dans certains secteurs paysans et parmi la population indigène. Pour l’ALN, la chose la plus importante est d’organiser les gens en se focalisation sur l’organisation de base et sur le « travail de terrain ». Son objectif c’est de construire un mouvement social à même de vaincre l’oligarchie colombienne et son gouvernement. L’ALN refuse la vision selon laquelle la guérilla constitue une sorte d’avant-garde révolutionnaire et que, par ce fait, est à même de représenter les aspirations de l’ensemble du peuple colombien. Au contraire, pour l’ALN la lutte armée est un prolongement de la lutte sociale décidé et conduit par les organisations de base. Ce sont donc les mêmes personnes qui mènent la lutte sur le terrain social à travers leurs organisations respectives (collectives universitaires, groupes de paysans sans-terre, communautés indigènes) qui doivent mener la lutte révolutionnaire armée face à un pouvoir qui ne leur laisse pas de choix. C’est notamment l’influence des secteurs chrétiens qui a permis d’élaborer cette conception de la lutte révolutionnaire qui refuse la construction d’une «élite dirigeante » détachée de la base et pouvant se substituer à elle dans la prise de décisions et dans la formulation des revendications. Cela constitue une première différence importante par rapport aux FARC. Elle se reflète d’ailleurs dans toutes les tentatives de négociation que l’ALN a entamé avec le gouvernement colombien. Pour l’ALN, il est essentiel que les personnes qui ont subi les effets directs et indirects de la guerre tels que la répression, la faim, le chômage, l’exclusion sociale et l’injustice sociale puissent participer au processus de négociation qui concerne leur avenir.

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Début des pourpalers entre le gouvernement et l’ALN le 7 février 2017 à Quito

Dans le processus de dialogue et de négociation qui a commencé à Quito le 7 février 2017, l’ALN et le gouvernement colombien se sont mis d’accord autour d’un programme qui prévoit 6 points  [11] : (1) participation de la société dans la construction de la paix ; (2) démocratie pour la paix ; (3) changements pour la paix ; (4) les victimes ; (5) fin du conflit armé et (6) mise en œuvre des accords. Ceux-ci serviront de base pour la poursuite des négociations. Depuis le début des négociations, l’ALN a affirmé que ce qui était en train de se passer ça n’avait rien à voir avec un processus de négociation entre les dirigeantes d’une guérilla et le gouvernement, mais qu’il s’agissait d’une négociation entre le gouvernement et le peuple colombien ! Cette insistance autour de la participation de base des personnes concernées se reflet aussi dans le titre officiel de cette table de négociation « Faisons la paix avec la participation décisive, active et efficace » (Hagamos la paz con Participación Decidida, Activa y Eficaz) [12].

La participation de la société civile aux négociations demeure un enjeu clé. À ce propos, la journée qui a eu lieu le 4 février 2017 sous le slogan « 100 rencontres pour la participation et la paix » (100 encuentros para la participación y la paz) est certainement une initiative importante. Des centaines d’organisations de la société civile ainsi que des dirigeants politiques et sociaux se sont réunies pour discuter de la manière de participer aux dialogues et demander que les propositions formulées par le peuple colombien soient intégré obligatoirement dans le texte final des accords de paix. Grâce à cette initiative, il y aura aussi la possibilité pour les migrants colombiens exilés de participer aux négociations et de faire entendre leur voix. Cela constitue un point important. En effet, il y a environ 6 millions des Colombiens et Colombiennes qui vivent à l’étranger. De plus, selon les chiffres du Haut Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies, il y a environ 500.000 réfugiés colombiens. Cette catégorie de la population revêt un rôle important. Sur le plan économique, les transferts d’argent des Colombiens exilés à des membres de leur famille vivant en Colombie constituent la principale source de liquidité pour l’économie colombienne, beaucoup plus élevée que les revenus générés par l’exploitation du pétrole ! En dépit de ce fait, elle reste une population abandonnée et oubliée par le gouvernement colombien.

Réd. CLB : La propriété de la terre revêt un rôle important dans l’histoire de l’Amérique latine. Comment ce problème s’articule-t-il en Colombie ? Est-ce que le processus de paix en Colombie va contribuer à résoudre les problèmes de l’expropriation des terres ou, au contraire, va-t-il l’approfondir ? De manière générale, comment le processus de paix va-t-il permettre (ou pas) la résolution des problèmes fondamentaux qui affectent la majorité de la population colombienne ?

DTD : Depuis la période d’indépendance jusqu’à nos jours, la terre en Colombie a toujours constitué un enjeu de pouvoir [13]. Rappelons-nous que les premiers à être expropriés de leur terre étaient les peuples indigènes. Au cours de la période coloniale, ces peuples ont été contraints à travailler comme esclaves sur des terres ancestrales qui leur appartenaient. Au cours du siècle dernier, de nouveaux territoires, par exemple dans les régions de Caqueta, Meta et Antioquia, ont été colonisés par des paysans pauvres déplacés qui étaient à la recherche de nouvelles terres à cultiver et/ou pour y pratiquer l’élevage. Ces mêmes territoires ont été à nouveau accaparés, cette fois-ci par des anciens et de nouveaux grands propriétaires qui, dans la plupart des cas, ont utilisé des méthodes violentes pour déposséder les paysans de leurs terres. Ces paysans déracinés ont par la suite entrepris de nouveaux processus de colonisation, ce qui a conduit à l’expansion de la frontière agricole en menaçant des zones environnementales stratégiques comme celle de l’Amazonie. Depuis la fin de la seconde moitié du XXe siècle et jusqu’à présent, le processus d’occupation des terres a été exacerbé par l’émergence de l’économie de la drogue avec l’encouragement et le soutient de l’État.

En termes marxistes classiques, la propriété de la terre ne joue pas un rôle important dans l’économie capitaliste. Elle ne permet pas l’accumulation du capital. En d’autres termes, elle ne crée pas des profits qui peuvent être par la suite réinvesti pour générer davantage de capitaux. La propriété des terres en Colombie permet de toucher une rente. Sa possession, permet donc une accumulation de revenus et non pas des capitaux. Néanmoins, le propriétaire terrier est en mesure d’exercer conjointement le pouvoir économique et politique et de bénéficier d’un statut territorial et social. D’ailleurs, jusqu’aux années 1950, le système de production rural en Colombie ressemblait plus à une exploitation féodale qu’à une production capitaliste. Aujourd’hui, le processus d’accumulation et d’accaparement des terres est contrôlé principalement par l’oligarchie colombienne et les sociétés multinationales actives en Colombie. Les États étrangers ne participent pas directement à ce type d’accaparement. Le gouvernement promut un modèle de développement axé sur le néolibéralisme en encourageant la production pour l’exportation. Ainsi faisant, dans beaucoup de régions il favorise le développement d’une agriculture industrielle de sucre, huile de palme, caoutchouc et bétail en bouleversant l’économie rurale qui garantie la subsistance à des millions de ménages paysannes. La mise en œuvre du modèle néolibéral a ouvert les frontières commerciales, il a aboli les droits de douane, les subventions agricoles et a favorisé la signature de plusieurs accords de libre-échange (ALE). À partir de 1991 les importations des produits agricoles ont fortement augmenté et sont passées de 700’000 tonnes de nourriture en 1990 à plus de 10 millions de tonnes en 2015. Cela a généré une prolétarisation du travail agricole exercé dans des conditions de travail épouvantables ainsi que le déplacement forcé d’un grand nombre de paysans contraints à vivre dans des conditions misérables dans les bidonvilles situé à la périphérie des grandes villes.

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Les pratiques d’accaparement des terres…

Donnons quelques chiffres. En Colombie, les exploitations de plus de 500 hectares occupent 62% du territoire national et sont détenues par seulement 4% des propriétaires. Selon l’indice de GINI (où 0 correspond à une égalité totale et 1, à une inégalité absolue), la Colombie a aggravé sa distribution inéquitable des terres de 0,85 à 0,87 entre 2000 et 2012 [14]. Dans les dernières années de la guerre, on estime que les groupes armés se sont appropriés de plus de 8 millions d’hectares de terre appartenant aux petits agriculteurs. En dépit des revendications des paysans expropriés, une grande partie de ces terres ont été utilisées pour l’implémentation du modèle de la monoculture intensive. Le gouvernement ne semble pas s’intéresser au fait que 72% des aliments consommés en Colombie sont produits par de petits agriculteurs. Malgré ce fait, il continue sur la voie du modèle néolibérale d’exploitation des terres axées sur l’agro-industrie d’exportation et continue à soutenir les investissements dans les grandes entreprises agricoles tout en assurant un cadre légal pour le business des grandes multinationales.

Tout cela contribue à appauvrir une large partie de la population. Selon l’Observatoire du travail de l’Université de Rosario [15], en Colombie il y a plus d’un million d’enfants qui travaillent. De plus, l’économie « submergée » concerne 49% des travailleurs et travailleuses « informels » dans les zones urbaines et 88% dans les régions rurales. Le travail « formel » ne se porte pas mieux : le taux de chômage officiel (largement sous-estimé) des jeunes âgés de 14 à 28 ans atteint le 16%, soit le double du taux de chômage national. Enfin,  seulement 30% des travailleurs sont soumis à un système de retraite dont seulement 10% pourraient bénéficier d’une retraite complète à la fin de la vie active.

Réd. CLB : Quelles sont les perspectives de construction d’un front démocratique et participatif large en Colombie capable de réaliser les revendications de la population colombienne (paysans, salariés, indigènes, etc.) ?

DTD : L’histoire de la gauche en Colombie est une histoire tragique. À titre d’exemple, un parti comme l’Union patriotique [16] a presque disparu de la scène politique du pays. Au cours des années 1980, au moment où ce parti bénéficiait d’un grand soutien populaire, les paramilitaires d’extrême-droite et des agents de l’État ont tué deux candidats à la présidentielle – Jaime Pardo Leal (1987) et Bernardo Jaramillo Ossa (1990) – ainsi que huit députés au parlement national, 13 députés régionaux, 70 conseillers municipaux, 11 maires et 5’000 militants de base. Quant à l’organisation de gauche ¡A Luchar! [17], les paramilitaires et le gouvernement ont tué plus de 1’200 militants. De plus, d’autres dirigeants de la M-19 ont été assassinés ; parmi eux le leader et candidat à la présidentielle Carlos Pizarro Leongómez (1990) reste le plus connu. L’histoire de la gauche en Colombie est donc une histoire tachée de sang. La gauche a été toujours stigmatisée et éliminée physiquement par l’élite politique et par l’oligarchie du pays. Seulement au cours de l’année 2016, 117 dirigeants politiques et défenseurs des droits de l’homme ont été tués ; cinq d’entre eux sont toujours disparus ; 47 ont subi des attentats contre leur vie et plus de 300 ont été menacés à plusieurs reprises de mort. Aujourd’hui, les chiffres attestent que 23 dirigeants politiques et sociaux ont été assassinés au cours des premiers mois de l’année 2017.

Depuis la naissance de l’actuelle République de Colombie, la vie politique en Colombie s’est caractérisée par l’alternance au pouvoir des deux partis traditionnels, le Parti libéral et le Parti conservateur. Ce sont des partis de droite qui représentent les intérêts des élites du pays. Le pouvoir a donc toujours été dans les mains de ces deux partis et la gauche a été marginalisée. Toutefois, elle a eu un autre grand ennemi politique, à savoir les luttes intestines entre différents secteurs de la gauche qui ont toujours constitué un obstacle majeur à un processus d’unité et d’action et donc aussi à la prise du pouvoir. À partir de la fin des années 1990 et au début des années 2000, avec la fondation du Pôle démocratique indépendant (PDI), nous assistons à une tentative d’unification de la gauche en Colombie. Des membres du PDI ont été élus au niveau local et régional. Lors des élections présidentielles des candidats comme Carlos Gaviria (2006) et Gustavo Petro (2010) recueillent un nombre non négligeable de votes [18]. À la suite d’une scission à l’interne du PDI qui a vue l’expulsion des composantes de l’Alternative démocratique, notamment le Parti communiste de Colombie et les anciens membres de la M-19, le PDI prend le nome du Pôle démocratique alternatif (PDA). L’entrée des FARC dans la vie politique va sans aucun doute stimuler le débat autour de la recomposition de la gauche en Colombie en vue des élections législatives de 2018.

Après des années de répression au cours des deux gouvernements d’Alvaro Uribe, les organisations sociales, principalement des paysans, des indigènes et des étudiants ont repris l’initiative de la mobilisation sociale et politique. Il est important de souligner que, à partir de 2013, ces secteurs ont mené des grèves nationales et parfois ont réussi à paralyser le pays par des grandes mobilisations. À ce propos, nous pouvons sans doute dire que la dynamique du mouvement sociale dépasse la dynamique de la gauche institutionnelle et elle est même supérieure en termes de prise d’initiatives. La gauche reste embourbée dans des discussions et querelles qui les empêchent d’interpréter et de répondre aux besoins et intérêts de la population est des organisations sociales de base. En Colombie on dit que les organisations de la gauche continuer à discuter du sexe des anges ! Elles n’arrivent pas à comprendre que le marxisme est une théorie et une pratique dialectique et dynamique et non pas un dogme que les gens appliquent aveuglement. Cependant, la plupart des organisations de gauche sont restées dans des interprétations dogmatiques du marxisme sans s’intéresser aux contributions des penseurs marxistes latino-américains par exemple José Carlos Mariátegui (1894-1930), le théologien de la libération brésilien Leonardo Boff, ou encore Camilo Torres qui prônaient un marxisme capable d’interpréter et comprendre notre propre réalité et identité en Amérique latine.

À mon avis, le grand débat qui devrait être assumé aujourd’hui en Colombie porte sur la question de savoir quel est le sujet politique en mesure de transformer en profondeur la réalité sociale dans ce pays : les organisations sociales et de masse ou les partis de la gauche ? Ce débat avait commencé au début des années 2000 en Amérique latine, notamment en Bolivie (mouvements cocalero, mouvement pour les services publiques, les luttes pour l’eau à Cochabamba, etc.) et en Équateur (mouvement indigène, etc.) et a donné lieu à des résultats intéressants dont il faudrait s’en rappeler. Toutefois, nous ne pouvons pas nier que dans de nombreux cas les partis de gauche ont utilisé et instrumentalisé le mouvement social dans le but de le canaliser dans une seule expression politique, de supplanter le sens de leurs luttes sociales et de le diviser selon leurs propres interprétations idéologiques dominantes.

Aujourd’hui, à travers leurs manifestations et revendications politiques, des organisations sociales telles que le Congrès des peuples autochtones qui regroupe des organisations indigènes, jeunes, femmes, agriculteurs, travailleurs urbains, des secteurs de la théologie de la libération ainsi que les LGBTI, ont gagné un espace politique important. Il s’agit d’un exemple de démocratie participative axé sur la représentation collective et sur un processus de construction horizontale dont l’objectif prioritaire est la construction d’un mouvement social et politique d’ampleur. L’une des grands défis de la gauche consiste à savoir interpréter et répondre aux besoins de ces mouvements sociaux qui transcendent les structures traditionnelles d’un parti et qui embrassent de nouveaux secteurs radicalisés à l’instar des LGBT, les militants écologistes, la jeunesse urbaine, ceux et celles qui se battent pour la protection des animaux, etc. Ces secteurs se mobilisent beaucoup et leurs idées et revendications doivent être prises en compte à travers la construction des espaces de discussion démocratique et inclusive dans le but de construire un projet politique dont le but c’est de lutter pour la justice sociale.

Sur le plan politique, des organisations de gauche pourraient à mon avis s’inspirer de l’expérience de la coalition politique Frente Amplio en Uruguay en 1971, au pouvoir pour nombreuses années, ou encore du modèle bolivarien des débuts où c’est les secteurs sociaux qui avait stimulé et guidé le processus révolutionnaire. En Colombie dans l’immédiat il y a une possibilité de former un front politique rassemblant les différents secteurs de la gauche seulement si l’on suit, comme l’affirmait Camilo Torres, le principe guide « nous travaillons sur ce qui nous unit et non écartons ce qui nous divise.»

* Dilberto Trujillo Dussan est médecin-vétérinaire, diplômé à l’Université de Tolima (Colombie). Après avoir milité dans divers groupes de la gauche en Colombie, il vit depuis quatre ans en Suisse et il est étudiant du Master en développement territorial de l’Université de Genève.


[1] http://www.verdadabierta.com/victimarios/243-la-historia/farc/4295-el-origen-1953-1964-

[2] La naissance de l’« Etat moderne » en Colombie se fonde sur un bipartisme élitaire caractérisé par l’alternance au pouvoir des deux grandes partis de la bourgeoisie colombienne, le Parti libéral, créé en 1848, et le Parti conservateur, créé en 1849. En dépit de la différente appellation, ces deux partis représentent les intérêts de deux ailes d’une bourgeoisie qui demeure profondément conservatrice et réactionnaire dans ce pays (Réd. CLB).

[3] L’auteur fait référence à la période historie d’affrontement militaire entre les deux partis connue sous le nom de la « La Violenia » (1946-1958). Suite au renversement du dictateur Rojas Pinilla qui avait la main sur le pays de 1953 à 1957. À la fin de cette période (1958 à 1978), le pays sera géré de façon «paritaire» par les deux partis bourgeois de 1958 à 1978. (Réd. CLB)

[4] Ce programme, adopté le 20 juillet 1964, s’articule autour de huit points dont le but principal est l’expropriation du régime du latifundo et la distribution des terres entre ceux et celles qui la cultivent. Le programme complet est disponible en espagnole sur ce site : http://www.farc-ep.co/octava-conferencia/programa-agrario-de-los-guerrilleros-de-las-farc-ep.html.

[5] Le M-19 fut constitué le 19 avril 1970 par des membres de l’Alliance nationale populaire (ANAPO) et des FARC. Cette date coïncide avec l’élection présidentielle qui sancit la victoire du candidat conservateur Misael Pastrana Borrero du Frente National et la défaite de l’ancien dictateur Gustavo Rojas Pinilla (ANAPO), au pouvoir du 1953 au 1957. Le M-19 dépose les armes le 8 mars 1990 pour fonder le parti Alianza Democrática. Au cours du processus de désarmement, son ancien chef et candidat à la présidentielle Carlos Pizarro Leongómez fut assassiné. Aujourd’hui, la plupart des anciens membres de ce parti ont rejoint le Polo Democràtico Independiente, devenu par la suite Polo Democràtico Alternativo, qui constitue la principale force de la gauche institutionnelle en Colombie. L’EPL fut fondée en 1967 par le Parti communiste marxiste-léniniste de Colombie avec une influence du courant maoïste du Parti communiste colombien. L’action de l’EPL s’est déroulée principalement dans le département de Córdoba (Caraïbes). En 1991, cette guérillas connaît un processus de désarmement partielle à la suite duquel une partie des anciens guérilleros fondent le parti politique Esperanza, Paz y Libertad laors alors que d’autres continuent la lutte armée. Le CRS est un courant de l’armée de libération nationale qui a déposé les armes en 1994. Manuel Quintín (1880-1967) fut un agriculteur et leader indigène qui s’est battu pour la protection et les droits des paysans indigènes. Le mouvement qui porte son nom a été crée en décembre 1984. Ses actions se déploient essentiellement dans le département de Cauca, au sud-ouest de la Colombie. Le 27 mai 1991, ce mouvement négocie un accord de paix avec le gouvernement. Le PRT de Colombie fut fondé en 1982 à la suite d’une scission à l’interne du Parti communiste de Colombie. Dès sas fondation, le groupe s’est lancé dans la lutte armée jusqu’à la signature d’un traité de paix en date 25 janvier 1991. Depuis, le parti a des représentants dans les institutions au niveau local, régional et national. (Réd. CLB)

[6]http://www.elespectador.com/noticias/judicial/fiscalia-declara-crimen-de-lesa-humanidad-financiacion-articulo-677924

[7] Le titre officielle de l’accord signé le 24 novembre 2016 est «Acuerdos de paz para terminar el conflicto y construir una paz estable y duradera » et il est disponible en espagnole sur ce lien : https://www.mesadeconversaciones.com.co/sites/default/files/24-1480106030.11-1480106030.2016nuevoacuerdofinal-1480106030.pdf

[8] Les accords prévoient essentiellement une série de mesures concernant les droits des victimes du conflit, les cultures illégales contrôlées par les narcotrafiquants, la politique de développement agricole, le désarmement définitif des FARC et leur transformation en parti politique. Suite à l’échec en référendum de la première version des accords, une nouvelle version a été ratifiée par le Congrès colombien le 30 novembre 2016. Celle-ci intègre une partie des revendications des opposants à l’accord, notamment du parti Centre démocratique de l’ex-président Uribe. Un article paru dans le quotidien français Le Monde, met en évidence trois changements substantiels intervenus entre la première et la deuxième version du texte : “ (1) Le tribunal spécial de paix prévu dans la première mouture est maintenu, mais ses contours sont modifiés. Aucun magistrat étranger n’y siégera. Seuls les chefs d’entreprise ayant joué un rôle « déterminant » dans le financement des milices paramilitaires auront à répondre de leurs actes. ; (2) La nouvelle version du texte prévoit que les FARC effectuent un inventaire de leurs biens dans le cadre de la réparation aux victimes. Les conditions des « peines restrictives de liberté » applicables aux combattants démobilisés ont, par ailleurs, été précisées : ils ne pourront pas sortir de la localité qui leur aura été assignée. ; (3) Enfin, contrairement à ce que prévoyait la version précédente, l’accord ratifié ne sera pas inscrit dans le bloc de constitutionnalité. Le texte définitif prévoit que l’accord ne puisse être modifié pendant douze ans mais il ne protège pas les FARC de modifications ultérieures.” (Le Monde, 1-12-2016)Le document de quelque 300 pages peut être téléchargé sur ce lien : https://www.mesadeconversaciones.com.co/sites/default/files/24-1480106030.11-1480106030.2016nuevoacuerdofinal-1480106030.pdf (Réd. CLB)

[9] Álvaro Uribe Vélez fut président de Colombie entre 2002 et 2010. Sa présidence a été marqué par le soutien à une agenda néolibérale, par le soutien aux multinationales et grands propriétaires terriers locaux, par des scandales de corruption lié aux narcotrafiquants ainsi que à la répression virulente contre les FARC. Depuis 2013, il est membre du parti d’extrême-droite Centre démocratique. http://www.semana.com/nacion/articulo/consejo-de-estado-reconoce-que-hubo-engano-generalizado-en-campana-del-no-al-plebiscito/510010(Réd. CLB)

[10] La théologie de la libération est un courant critique de l’Eglise catholique qui s’est développé en Amérique latine au début des années 1960. Son point de départ c’est l’explication de la pauvreté dans les pays d’Amérique latine comme étant le résultat d’un système sociale réel et non pas de la « volonté divine ». Ce courant tranche avec la doctrine traditionnelle des Eglises catholiques et protestantes. En dépit de la diversité de points de vue des théoriciens de ce courant, le sociologue Michel Löwy, met en évidence les éléments fondamentaux sur lesquels repose ce mouvement: « (1) un réquisitoire moral et social contre le capitalisme en tant que système injuste, inique, forme de pêché structurel ; (2) l’usage de l’instrument marxiste afin de comprendre les causes de la pauvreté, les contradictions du capitalisme et les formes de la lutte de classes ; (3) une option en faveur des pauvres et la solidarité avec leur lutte d’auto-émancipation sociale ; (4) développement de communautés chrétiennes de base parmi les pauvres comme nouvelle forme de l’Eglise et comme alternative au mode de vie individualiste imposé par le système capitaliste ; (5) une nouvelle lecture de la Bible, tournée notamment vers des passages comme L’Exode comme paradigme de la lutte de libération d’un peuple asservi ; (7) la lutte contre l’idolâtrie (et non l’athéisme) comme ennemi principal de la religion – c’est-à-dire contre les nouvelles idoles de la mort adorées par les nouveaux pharaons, nouveaux César et Hérode : Mammon, la Richesse, la Puissance, la Sécurité nationale, l’Etat, la Force militaire, la « Civilisation chrétienne occidentale »… ; (8) une critique de la théologie dualiste traditionnelle comme produit de la philosophie platonicienne grecque et non de la tradition biblique, dans laquelle les histoires humaine et divine sont distinctes mais inséparables. » (Michel Löwy, A propos de la théologie de la libération, Revue Tout est à nous !, n°43, mai 2013). (Réd. CLB)

[11] Voir le programme en espagnol : http://www.eln-voces.com/descargas/dialogos/agenda_paz.pdf

[12] https://mesasocialpaz.wordpress.com/2017/01/31/100-encuentros-por-la-participacion-y-la-paz/

[13] En 1499, la Colombie était sous la domination de la Couronne d’Espagne et faisait parti de la Nouvelle-Grenade, un territoire qui couvrait une grande partie de la Colombie actuelle, l’Equateur, une partie du Venezuela et le Panamà. Pendant cette époque, les terres découvertes et à découvrir était de propriété des colons. Les luttes d’indépendance aboutissent à la proclamation de la République de Colombie le 17 décembre 1819. Elle s’effondre le 19 novembre 1831 à cause de la sécession du Venezuela et de l’Equateur. Par la suite, une période de guerre civile interne s’ouvre jusqu’à la fondation de l’actuelle République de Colombie en 1886. Pour un aperçu historique du rôle de la propriété de la terre et du développement capitaliste en Colombie, voir l’article de Daniel Libreros et de Jorge Gantiva Silva paru sur le site alencontre.org en date 10 mai 2013 : http://alencontre.org/ameriques/amelat/colombie/colombie-politique-de-paix-et-reinvention-de-la-politique-histoire-terre-et-construction-du-bien-commun.html(Réd. CLB)

[14] http://www.investigaction.net/le-modele-neoliberal-en-colombie-spoliation-et-accaparement-des-terres/

[15] Universidad del Rosario. Observatorio Laboral. Trabajo decente en Colombia: balance deficitario. 2015. Disponible en espagnol : http://www.urosario.edu.co/sala-de-prensa/noticias/Generales/Trabajo-decente-en-Colombia-balance-deficitario/

[16] L’Union patriotique (UP) naît le 8 mars 1984 à la suite des accords de paix dites de La Uribe, du nom de la municipalité du département de Meta (Colombie centrale) où l’accord a été signé, entre le gouvernement du Belisario Bentancur (Parti conservateur, 1982-1986) et les FARC. Ces accords auraient dû garantir des réformes sociales et économiques ainsi que la transformation de la guérilla en partie politique. Pourtant, ce parti a fait l’objet de ce que certaines appellent une « génocide politique » pour qualifier la vague d’assassinat qui a frappé non moins de 5000 de ses membres dont des parlementaires, des maires et des dirigeants du mouvement. (Réd. CLB)

[17] ¡A Luchar! fut une coalition politique crée en 1985 par des paysans, étudiant-e-s, indigènes, ouvriers et membres de la théologie de la libération. Le but était de continuer la bataille sociale sur le plan politique à travers l’engagement institutionnel. Ce rassemblement s’inscrit dans la foulée de la période de « dialogue » ouverte sous la présidence Betancur entre le gouvernement et les groupes de guérilleros, notamment les FARC (cf. accord de paix en 1984). Les membres d’¡A Luchar! furent aussi durement réprimés. (Réd. CLB)

[18] Le PDI est une coalition politique fondée en 2002 par des membres de ANAPO et de l’Alliance Démocratique-M-19, le parti politique né en 1990 à la suite du désarmement de la guérilla M-19. En 2005, avec l’intégration de Alternative démocratique guidée par Carlos Gaviria Díaz, le parti change de nom et devient Pôle démocratique alternatif. D’inspiration sociale-démocrate, le PDA disposes des élus au Sénat et à la Chambre des députés au niveau national ainsi que plusieurs élus au niveau local et régional. Lors des élections présidentielles de 2006, avec 22.04% de votes le candidat Gaviria se place en deuxième place derrière le président Uribe qui sera ensuite élu pour son deuxième mandat. En 2007, le candidat Samuel Moreno Rojas gagne la mairie de la ville de Bogota. En 2011, à la suite d’un scandale de détournement de fonds publiques, il sera remplacé par Gustavo Petro. Ce dernier, avait obtenu 9,14% de votes lors des élections présidentielles de 2010. En 2014, la candidate à la présidentielle Clara López Obregón recueille 15,23% de votes et se place au quatrième rang. (Réd. CLB)