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Après les « événements de Cologne », les ressorts des violences faites aux femmes

Discussion avec
Véronique Nahoum-Grappe
Anthropologue et chercheuse à l’EHESS (Ecole des hautes études en sciences sociales, Paris), membre de la Ligue des droits de l’homme et du collectif Paris 13 d’aide au camp de réfugié·e·s du Pont d’Austerlitz.
· Genève, mercredi 27 avril 2016, 18:15Uni-Mail, salle MR170
· Lausanne, jeudi 28 avril 2016, 17:15, Unil, Geopolis, salle 2207

Au cours de la nuit du Nouvel-An 2016, à Cologne et, dans une moindre mesure, dans d’autres villes d’Allemagne, des centaines de femmes ont été victimes d’agressions sexuelles. Depuis, l’origine étrangère de certains agresseurs a été utilisée, à plusieurs reprises, comme prétexte pour nourrir le discours xénophobe. Il s’agit d’un amalgame qui vise à la fois à occulter les ressorts des violences faites aux femmes et à soutenir un agenda de rejet et de contrôle accru des migrant·e·s.

La persistance des violences faites aux femmes

Les violences faites aux femmes existaient (et existent toujours !) en Allemagne et ailleurs dans le monde bien avant les « évènements de Cologne ». Un rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) affirme qu’une femme sur trois dans le monde est victime de violence physique et sexuelle. Un important sondage effectué auprès des femmes vivant en Europe atteste des proportions de violence alarmantes parmi les femmes interrogées : 22% de violences sexuelles, 48% de violences psychologique et 55% de harcèlement sexuel. Les menaces constantes des agresseurs, le sentiment de peur des victimes et l’étendue du phénomène ont pour conséquence que ces chiffres sous-estiment le phénomène de violences faites aux femmes. Celui-ci reste souvent « invisible ». Cette invisibilité s’aggrave en situation de migration. On entend très rarement parler des conditions dans lesquelles vivent des milliers de femmes migrantes. Pourtant, parmi les migrants fuyant les guerres et la pauvreté, il y a une proportion élevée des femmes. Selon l’ONU, elles représentent le 48% des migrants dans le monde. D’après les dernières données de l’UNICEF, femmes et enfants composent le 60% des migrants qui traversent la frontière de la Grèce vers Gevgelija (ex-république yougoslave de Macédoine). Aux discriminations qu’elles subissent en tant que migrantes, se rajoutent des violences dues à leur genre : viols, violences policières dans les camps, conditions sanitaires terribles lors des accouchements et prostitution forcée. Dans le dernier rapport sur la brutalité policière dans les camps de réfugiés, Human Rights Watch parle notamment de gender specific violences.

L’instrumentalisation des femmes et des migrants

L’instrumentalisation des « évènements de Cologne » par la presse et par certains partis politiques doit être analysée dans le contexte d’une grave crise économique et sociale, caractérisée par une réponse autoritaire des gouvernements. Les droits sociaux des populations sont violemment attaqués. Les gouvernements utilisent l’horreur des attentats terroristes, le drame des dizaines de milliers de personnes qui fuient la guerre en Orient pour justifier les attaques aux droits les plus fondamentaux: sécurité des personnes, libre circulation, travail, éducation, santé, logement, etc., légitimant ainsi les mesures autoritaires aux yeux de la population.

Dans ce cadre, on assiste au renforcement du racisme et de la xénophobe et à la montée de partis de droite extrême et d’extrême droite en Europe. Un exemple récent : l’Alternative für Deutschland (AFD) – parti ultralibéral et de droite extrême créé en 2013 – a profité de ces événements dramatiques et a obtenu des scores exceptionnels lors des élections régionales du 6 mars dernier, allant jusqu’à recueillir 24% des votes dans la Saxe-Anhalt (région de l’ex-DDR). De plus, ces évènements dramatiques sont délibérément exploités pour renforcer le climat raciste et xénophobe dans la population. Certaines personnes passent même à l’acte. Des agressions, parfois graves, de personnes d’origine immigrée ont eu lieu au lendemain des événements de Cologne. Mais les agressions à fond raciste et xénophobe en Allemagne ne se limitent pas aux immigrés. En octobre 2015, deux femmes ont été poignardées : Henriette Reker – actuelle maire de Cologne connue pour son activisme dans l’accueil des réfugiés en Allemagne – ainsi qu’une autre femme. . L’agresseur était un Allemand de 44 ans, chômeur de longue durée et «pas actif politiquement». Interpellé par la police juste après les faits, il a confirmé la motivation raciste de ses actes.

NON au sexisme, NON au racisme, NON à la xénophobie!

Dans le but de combattre le sexisme, le racisme et la xénophobie nous jugeons nécessaire de s’interroger sur les ressorts des violences faites aux femmes en général et, en particulier, de revenir sur les violences que vivent quotidiennement les femmes migrantes et réfugiées. Pour aborder ces questions, nous discuterons avec Véronique Nahoum-Grappe, Anthropologue et chercheuse à l’École des hautes études en sciences sociales (Paris), membre de la Ligue des droits de l’homme et du collectif Paris 13 d’aide au camp de réfugié·e·s du Pont d’Austerlitz.

Organisé par le Cercle la brèche. Entrée libre. L’université est étrangère à cet événement.

Soutenu par le groupe de solidarité du refuge R à l’Unil et le Groupe Regards Critiques

À lire: Véronique Nahoum-Grappe, Après Cologne, les ressorts des violences faites aux femmes  (alencontre.org)