Environ 4000 personnes ont défilé, le samedi 1er octobre, par les rues de la capitale pour défendre les droits des migrant-e-s sans-papiers au cri : «Aucun homme n’est illégal !». Plusieurs familles d’étrangers (Africains, Indiens, Afro-Américains, Italiens, Turcs, etc.) ont manifesté avec des citoyens suisses pour demander la régularisation de tous les sans-papiers.
La manifestation s’est ainsi révélée un moment de réflexion collective sur le sort des travailleurs sans-papiers et sur les politiques suisses relatives aux étrangers, politiques xénophobes et injustes. Quelques affiches rapportaient des témoignages sur les conditions de vie des sans-papiers: « Nous sommes admises à titre provisoire dans une situation de précarité! » ou « 10 ans de travail en Suisse et toujours pas de permis B! ». Ce sont des mots qui témoignent des rêves et des espoirs déçus de ceux qui quittent leur propre pays dans des conditions de vie inhumaines, avant d’arriver dans un autre qui ne leur donne aucune certitude quant à l’avenir!
L’organisation patronale Economiesuisse explique que l’immigration est fortement dépendante des besoins économiques : la « libre circulation des personnes » avec les pays de l’UE, entrée en vigueur en 2005, a permis de compenser les faibles marges de croissance économique des années 1990. Ainsi, l’immigration a soutenu la consommation intérieure et maintenu la stabilité des investissements immobiliers en raison d’une demande accrue de logements.
Dans un moment de crise économique et sociale profonde comme celle que nous traversons aujourd’hui, il est facile de comprendre que les sans-papiers sont un outil dans les mains des employeurs pour maintenir et accroître leurs profits au détriment des salarié-e-s. En effet, il est plus difficile de contester les conditions de travail imposées par les employeurs après s’être enfuis d’un désastre social et économique ; d’autant plus lorsqu’on travaille au noir et qu’on ne peut pas faire appel à la loi pour contester un licenciement.
Tout cela s’inscrit dans une économie européenne (et mondiale) dans laquelle les salarié-e-s paient le prix d’une crise dont ils-elles ne sont pas responsables. L’attaque contre le salaire sous ses différentes formes (fiche de paye, prestations des assurances sociales, services publics, etc.) est sans précédent. Ainsi que le Mouvement pour le socialisme (MPS) l’a indiqué sur son tract distribué à la manifestation, la part des salaires dans le revenu national en Suisse a diminué de 62,7% à 55,4% alors que les profits ont augmenté de 37,3 à 44%, 6%, entre 2008 et 2010. Ces chiffres ne tiennent pas compte des révisions de l’assurance chômage, de l’AVS, de l’AI, de l’assurance-maladie, etc. Des couches de plus en plus larges de salarié-e-s souffrent d’une insécurité croissante. Ce n’est qu’à partir de ces constats que nous pouvons (et devons) prendre conscience de notre statut commun de jeunes travailleurs et travailleuses précaires.
Pour surmonter la division des salarié-e-s mise en œuvre par le gouvernement et les employeurs, il est essentiel de lancer une mobilisation à long terme qui rassemble tous les exploité-e-s, en combinant les différents intérêts et besoins de la classe des salarié-e-s. Ce sont tant les sans-papiers, les migrants, les travailleurs et travailleuses au noir que les salarié-e-s « légaux » qui produisent les richesses de nos pays. Et, pourtant, ils n’en reçoivent que des miettes !
Nous appelons à la régularisation de tous les sans-papiers et le respect des droits sociaux fondamentaux qui sont indissociables d’un renforcement des droits de tous travailleurs et de toutes les travailleuses, à partir d’une protection véritable contre les licenciements abusifs et l’introduction d’un principe juridique obligeant les employeurs à appliquer le principe « à travail égal, salaire égal ! ».
C’est un défi complexe, mais l’histoire nous enseigne que les travailleurs et les travailleuses peuvent le relever !